04 novembre 2024
Infrastructure insuffisante, autonomie limitée et coût élevé, les acheteurs boudent les voitures électriques. Cette conjoncture touche-t-elle aussi le Var et notre région ? Explication de Patrick Chatrieux, Président de Mobilians* pour la région Sud.
©photo-varinfos - Patrick Chatrieux
Patrick Chatrieux, certains constructeurs envisagent de supprimer des marques voire de fermer des usines, cette inquiétude a-t-elle des répercussions dans le Var ?
Notre département connaît la plus forte progression du nombre d’immatriculations de la région (voir tableau ci-contre). Mais les chiffres sont trompeurs car le marché de l’électrique dégringole en raison du prix trop élevé des voitures, du maillage d’infrastructures de recharge insuffisant surtout en copropriété et en zone rurale ou périurbaine, et de la confiance encore faible accordée à l’électrique, entre autres fiabilité et coût des réparations… Il sera cependant intéressant d’observer le comportement des Français en cette fin d’année. Certains seront peut-être tentés d’acheter un véhicule électrique avant le rabotage des aides annoncé début 2025.
2025 sera une année compliquée ?
Oui avec un durcissement de la norme du seuil des émissions de CO2. Avec cette accélération du calendrier, certains constructeurs, qui craignent les milliards d’euros d’amendes de la part de Bruxelles, envisagent des fermetures d’usines. En France, la première mouture du projet de loi de finances pour 2025 laisse à penser que les aides d’Etat seront quasiment réduites à néant. Il risque ainsi de se passer la même chose qu’en Allemagne : l’arrêt des aides a coïncidé avec le retour en force du thermique. Une étude du CSA et de la PFA le confirme : 77% des Français renonceraient à acheter une voiture électrique si la prime à la conversion et le bonus écologique devaient disparaître.
Vous ne semblez pas très optimiste ?
Cela fait près de 40 ans que je suis dans la branche automobile. Nous avons connu des périodes difficiles et compliquées mais jamais comme celle-ci, où l’on impose aux constructeurs une transition énergétique sur une période trop courte. Il y a un risque de mettre en péril notre filière, comme l’a été l’industrie et le nucléaire. J’espère qu’il n’est pas trop tard. En réalité, nos technocrates peuvent nous imposer leurs idées mais ils n’avaient vraisemblablement pas pris en compte que, au final, celui qui décide de passer au tout électrique et à une transition énergétique, c’est l’utilisateur final.
Malgré tout, selon des analystes, le marché reste pour l’instant en expansion. Comment les professionnels du secteur s'adaptent-ils ?
Il existe désormais suffisamment de modèles pour conseiller le bon véhicule en fonction des besoins du client. Aujourd’hui le coût des batteries représente environ un tiers du prix mais il est en baisse constante. Elles résistent plus longtemps dans le temps et Mobilians accompagne les entreprises innovantes, à l’instar de Be Energy dans le Vaucluse, capable de régénérer les batteries et de doubler leur durée de vie. Les technologies progressent vite. Les futurs modèles sont beaux, très fonctionnels et disposent d’une meilleure autonomie. Il est indéniable qu’ils seront plus attractifs. C’est d’ailleurs tout l’enjeu : rendre « sexy » l’électrique auprès des clients.
*Mobilians est est une organisation patronale française créée en 1902 sous le nom de Chambre syndicale du commerce de l'automobile. Sa mission est de défendre les intérêts des entreprises de la distribution et des services de l’automobile en France .
Article Conrad EBERHAERD