ÉCO D’ICI AVEC BRUNO DARTIGUENAVE 

“Traduire les évolutions, anticiper et aider”

Expert-comptable et dirigeant du Groupe BDCA, Bruno Dartiguenave accompagne depuis les entreprises varoises dans leurs choix stratégiques et leur évolution. Observateur privilégié du tissu économique local, il partage son regard sur l’évolution de son métier, loin des clichés d’antan.

Bruno Dartiguenave ©varinfos

Bruno Dartiguenave, dans un contexte économique instable, quel doit être le rôle de l’expert-comptable ?

L’image du simple “teneur de comptes” appartient clairement au passé. Aujourd’hui, l’expert-comptable est un véritable partenaire stratégique du dirigeant. Nous accompagnons les entreprises dans toutes les phases de leur développement : création, financement, transmission, gestion de crise, transition numérique ou environnementale, pilotage de l’activité, analyse des coûts…. Notre rôle consiste de plus en plus à aider à la décision, à donner du sens aux chiffres pour éclairer les choix de gestion. La donnée comptable devient un outil de pilotage en temps réel, et non un simple bilan en fin d’année. Cette évolution est passionnante : elle redonne à notre métier toute sa dimension de conseil et de proximité.

Quelles sont les principales difficultés que rencontrent nos chefs d'entreprises ?  : trésorerie, accès au financement, recrutement, fiscalité, transition écologique… ?

La première préoccupation reste la trésorerie. Beaucoup d’entreprises ont épuisé leurs marges de manœuvre pendant les années de crise, et la hausse des taux d’intérêt a rendu le financement plus coûteux. Les dirigeants doivent composer avec un équilibre fragile entre rentabilité, investissements et maintien de l’emploi. Vient ensuite la question du recrutement : attirer, former et fidéliser les talents est devenu un défi majeur, notamment pour les métiers techniques ou de terrain. Enfin, la transition écologique monte en puissance : les chefs d’entreprise y voient une nécessité, mais aussi une source d’inquiétudeface à la complexité des dispositifs et aux coûts d’adaptation (norme Européenne sur la durabilité).

La réglementation évolue en permanence. Les TPE/PME ont-elles encore la capacité de suivre ? Quelle est leur plus grande source de stress administratif aujourd’hui ? Difficile de suivre la ou les  réglementations… 

C’est sans doute le point le plus sensible. Les dirigeants de petites structures passent une part considérable de leur temps à gérer l’administratif, la paie, la fiscalité, les obligations sociales ou environnementales. Chaque réforme, même bien intentionnée, ajoute souvent une couche de complexité supplémentaire. Le stress vient moins de la réglementation elle- même que de son instabilité : les règles changent trop souvent. Cela crée de l’incertitude et mobilise des ressources qu’ils préféreraient consacrer à leur développement. C’est là que notre rôle de conseil prend tout son sens : traduire ces évolutions, les anticiper, et aider les dirigeants à se recentrer sur leur cœur de métier.

Quelles sont les erreurs à ne pas commettre ?

L’erreur la plus courante, c’est de vouloir tout gérer seul, sans suffisamment s’entourer. Beaucoup de chefs d’entreprise portent tout sur leurs épaules : la stratégie, les finances, le management, parfois même la communication. Dans un contexte mouvant, cette posture devient intenable. Autre travers : différer les décisions importantes, dans l’attente d’un hypothétique “retour à la normale”. Or, l’économie ne reviendra pas à un état stable comme  avant. Ceux qui s’en sortent sont ceux qui acceptent le changement comme une donnée permanente, et non comme une parenthèse. Pour moi en période de crise il faut un haut niveau de communication.

On réduit souvent l’expert-comptable à la comptabilité. Comment décririez-vous aujourd’hui la nouvelle mission de votre profession auprès des chefs d’entreprise ?

L’image du simple “teneur de comptes” appartient clairement au passé. Aujourd’hui, l’expert-comptable est un véritable partenaire stratégique du dirigeant. Nous accompagnons les entreprises dans toutes les phases de leur développement : création, financement, transmission, gestion de crise, transition numérique ou environnementale, pilotage de l’activité, analyse des coûts etc. Notre rôle consiste de plus en plus à aider à la décision, à donner du sens aux chiffres pour éclairer les choix de gestion. La donnée comptable devient un outil de pilotage en temps réel, et non un simple bilan en fin d’année. Dans l’incertitude législative et réglementaire l’expert-comptable doit conseiller ses clients tant sur le plan économique, fiscal et social voire managérial. Cette évolution est passionnante : elle redonne à notre métier toute sa dimension de conseil
et de proximité.

Vous avez longtemps été impliqué au sein de l’Ordre des Experts-Comptables. Quelles actions ou orientations vous paraissent essentielles aujourd’hui pour soutenir le tissu économique régional ?

Oui, j’ai eu la chance de contribuer, à mon échelle, à la dynamique collective de la profession dans la région. L’Ordre joue un rôle majeur de relais et de soutien aux entreprises, notamment par la formation, la simplification des démarches et la diffusion d’une culture de la gestion responsable. Mais au-delà des institutions, je crois beaucoup à l’action de terrain : chaque cabinet, à travers son accompagnement quotidien, participe à la vitalité économique
du territoire. Dans un département comme le Var, où les TPE/PME et les structures familiales représentent l’essentiel du tissu entrepreneurial, cette proximité est une véritable force.

Vous accompagnez des entreprises depuis de nombreuses années. Qu’est-ce qui vous inspire le plus chez les dirigeants de notre territoire ?

Ce qui m’inspire le plus, c’est leur engagement. Les dirigeants varois ont souvent un lien viscéral avec leur entreprise : elle représente bien plus qu’un outil économique, c’est une aventure humaine et familiale. Beaucoup d’entre eux ont bâti leur réussite à la force du travail, avec une proximité réelle vis-à-vis de leurs équipes et de leurs clients. J’admire aussi leur capacité à rebondir. Même après des périodes difficiles, ils savent se réinventer, trouver des solutions, et avancer sans se plaindre. Cette mentalité “terrain”, ancrée dans la réalité locale, est une richesse précieuse.

Dans quel état d’esprit sont nos chefs d’entreprises du Var aujourd’hui ?

Je dirais qu’ils sont lucides, pragmatiques, mais incroyablement résilients. Malgré un environnement économique incertain, les dirigeants varois conservent un vrai sens de l’adaptation, avec une agilité remarquable face aux différentes crises. Cette mentalité “terrain”, ancrée dans la réalité locale, est une richesse précieuse.

Propos: Conrad EBERHAERD

Bruno Dartiguenave : portrait:

Expert-comptable, fondateur et dirigeant du Groupe BDCA, Bruno Dartiguenave accompagne les entreprises du Var, de la région Sud et de l’île de France. Amoureux du conseil, il défend une vision humaine et durable de l’entrepreneuriat, fondée sur la proximité, l’innovation et la transmission. Ancien élu et ancien vice-président du CROEC PACA.
Ancien administrateur CAF.
Ancien juge prud’homal.